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ILS NE POSSÈDENT RIEN et SONT HEUREUX !

par ophelyia, lundi 30 janvier 2023, 10:23 (il y a 423 jours) @ corbeau

Vous voulez parler du sujet de tout perdre, je suis bien placée pour vous répondre. Comme je vous l'ai déjà raconté, quand j'ai arrêté mes études universitaires, je me suis trouvé un appartement dans le quartier Saint-Henri, un petit deux et demi qui s'est rapidement transformé en cauchemar pour moi.

Je vous mets la photo de mon appartement, photo du dossier de la Ville de Montréal, qui s'est retrouvée dans l'émission ''Les Docteurs'' de Radio-Canada pour mettre en image le thème de l'émission qui était la moisissure dans les logements et son impact sur la santé des gens (vous allez comprendre pourquoi l'équipe de Radio-Canada a choisi les photos de mon appartement, sûrement pas pour mes talents de photographe...):

[image]

Il faut que je vous dise que, quand j'ai loué mon appartement, il n'y avait pas de plaques noires comme vous le voyez!!! Il y avait des indices de moisissures que je n'ai pas su voir en visitant l'appartement et que je ne connaissais pas à l'époque comme le suintement de la peinture, les coins des murs qui commençaient à noircir et il y avait une grosse ''crack'', dehors dans le mur de briques, sur un coin de mur exposé. Maintenant, j'ai un œil de lynx car j'ai beaucoup lu sur le problème de la moisissure et comment le déceler.

Avant toute cette explosion de champignons, j'avais fait venir Hydro-Québec qui avait un programme d'aide pour aider les locataires à faibles revenus aux prises avec des logements-passoires, ils m'avaient aidé à boucher la ''crack'' dehors avec du calfeutrant mais il était déjà trop tard, l'accumulation d'humidité, dans les murs, était déjà trop grave... Cet appartement était condamné à se désagréger malgré l'amour que j'ai tenté de lui apporter. Un voisin, qui m'a aidé et qui connaissait bien Saint-Henri, m'a aussi laissé entendre que, fort probablement, mon propriétaire avait peut-être utilisé mon appartement, dans le passé, pour faire pousser de la marijuana, chose très fréquente dans le quartier Saint-Henri et, connaissant mon propriétaire, ça ne m'aurait pas surprise du tout. Il y aussi l'histoire d'un autre voisin qui m'a expliqué qu'il avait nagé dans ma rue, quand il était jeune, quand le canal Lachine avait débordé, et que tous les blocs de ma rue avaient été inondés...

Une autre chose à laquelle j'ai été confrontée est le malaise des gens face à mes photos, ils ne voulaient même pas regarder mes photos, ils ne voulaient pas voir la misère dans laquelle je vivais, il fallait que je me batte pour me faire entendre!!!!

Un matin, c'était le début du printemps, je suis sortie sur le petit balcon en bois qu'il y avait dans ma cour et j'ai pleuré, dehors, à chaudes larmes, entourée de mes meubles moisis, de mes boites de notes de cours et de ma bibliothèque dont la majorité des livres étaient moisis, j'étais assise sur ma chaise de bureau dont le tissu était rendu tout picoté de points noirs et j'ai pleuré au travers de mes affaires que j'allais devoir jeter aux poubelles. Merci à mon voisin qui m'avait aidé, dans ce calvaire, et qui avait pris la peine de passer un gros couteau dans mon matelas pour ne pas que quelqu'un d'autre, de mon quartier de misère, le ramasse car mon matelas aurait pu être ramassé quand même malgré les points oranges-verts-noirs-blancs dont il était parsemé...

Pour avoir perdu, une fois, presque toutes mes affaires, je peux vous dire qu'il n'y a rien d'heureux dans le fait de perdre les choses de base dont on a besoin dans la vie. Mon réfrigérateur était complètement fini, je ne pouvais pas le garder car les spores de moisissures avaient colonisé pour sûr tout le système de ventilation de l'appareil.

Pourtant, je suis une personne qui essaie de s'en tenir aux choses de base, je ne possédais pas tant de choses superflues, ce que j'avais était des choses qu'il nous faut avoir pour pouvoir vivre un quotidien normal. Malgré le fait que je suis partisane de la simplicité volontaire, je ne vous cacherai pas le désarroi que j'ai vécu de perdre mes choses. En tout cas, j'étais loin d'aller bien comme personne à cette époque. Ce n'est pas pour rien qu'en Psychologie existe la Pyramide de Maslow:

[image]

Au moins, je sais que je suis capable de me relever, je l'ai déjà fait, et, s'il faut me relever encore une fois, après le 24 février 2023, et me reloger à nouveau, je le ferai mais je suis certaine que j'aurai beaucoup de peine encore... Cette fois-ci, rien ne sera récupérable chez moi, l'eau et la moisissure ça pardonnait un peu plus que le feu atomique...

À ceux qui se cherchent un appartement à Montréal, soyez bien aux aguets car, souvent, les propriétaires ne font que ''patcher'', ils n'assainissent pas comme il faut les matériaux contaminés. En fait, une dame du centre communautaire où j'étais animatrice habitait dans le HLM en face de mon appartement moisi et elle a vu mon propriétaire faire les travaux après mon départ. Ce fut, selon son observation, très bref alors c'est donc évident qu'il n'a fait que ''patcher'' les dégâts et, malheureusement, dans quelques années, le locataire qui a pris ma place va se retrouver avec un gros problème de la même gravité que ce que j'ai vécu car les champignons vont revenir avec le temps et ronger les nouveaux matériaux si le ménage n'a pas été fait adéquatement.

Désolée si j'ai de l'air trop matérialiste...

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